Laurence Tuot
L’indiscrétion de Vasari
Giorgio Vasari, en parsemant ses Vite de révélations indiscrètes sur la vie privée des artistes de la Renaissance, a participé à la construction d’une certaine idéologie de l’art, encore largement en vigueur aujourd’hui. En échafaudant un récit où les processus créatifs sont associés à des pratiques intimes et futiles, l’historien se positionne en effet en sauveur d’une mémoire artistique en péril et pose les fondements d’une esthétique négative, se nourrissant, paradoxalement, de l’absence et de l’invisibilité des œuvres.
Laurent Buffet
Mobilités
L’article engage un questionnement sur l’histoire et le statut des pratiques itinérantes de l’art contemporain, en revenant sur certaines analyses publiées sur ce sujet au cours des dernières décennies, puis interroge leur actualité à travers trois exemples. Une question traverse cette étude : en quoi l’art du déplacement est-il susceptible de s’affirmer comme une forme originale d’occupation de l’espace, dès lors que la mobilité apparaît comme l’une des idéologies dominantes de notre époque ?
Jérôme Dupeyrat
Tracts, Dissémination discrète, discrétion de masse
Des avant-gardes à aujourd’hui, les tracts d’artistes s’affirment entre fonction informative et manifestations artistiques. Empruntant les modèles de la communication politique et publicitaire tout en en détournant les codes et les objectifs, ce sont des médias alternatifs – tant par leurs contenus que leurs modes de diffusion – qui opposent à la propagande et à la communication de masse une pratique de l’art discrète et pourtant efficiente sur les plans esthétique, social ou politique.
Marie Boivent
De la parution à la disparition : infiltrer la presse :
Les pages de magazines et de journaux sont devenues un nouveau lieu de présentation de l’art. Depuis les années 1960, les œuvres se sont infiltrées dans tous les emplacements « ouverts » – petites annonces, espaces publicitaires – voire se sont substituées à des contenus informationnels. Paradoxalement, ces propositions, conçues pour être reproduites en milliers d’exemplaires, ne sont pas plus visibles que les œuvres uniques, préférant la plupart du temps le mimétisme à l’exhibitionnisme.
Nicolas Thély
Avis de passage
Les pratiques discrètes ont déjà eu lieu et elles continuent d'avoir lieu. Elles n'ont de sens et de valeur que par leur discrétion. C’est peut-être bien ce qui dérange, car si elles semblent désintéressées, elles ne le sont pas : elles engagent entièrement leurs auteurs. Elles ne sont ni invisibles ni hors d'un circuit de l'art. Elles n’exigent aucun retranchement ou retirement du monde : elles sont nécessairement mondaines. Nourri de scepticisme, ce texte est paradoxalement une invitation à réfléchir sur les conditions de l’acte de création et non à spéculer sur de malignes stratégies de séduction.
Ghislaine Trividic
Elle ressemblait à un Greuze
Pour discrète que soit l’apparition des œuvres d’art dans le roman policier, leur mode opératoire relève fréquemment d’un « outil visuel » autorisant l’économie de longues descriptions. Instrumentalisées à des fins aussi diverses qu’il existe d’occasions de les faire apparaître, leur présence ne se révèle pas véritablement indispensable. Cependant, certaines d’entre elles, moins ornementales, atteignent le statut de premier rôle au sein de récits mouvementés.